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dossier produits domestiques : danger

ENFANCE : DANGER DES PRODUITS DOMESTIQUES

Ils sont présents au quotidien que ce soient en prévention des parasites (puces, tiques) des animaux domestiques, lors de l’utilisation de diffuseur anti-moustiques, les traitements anti-poux, le nettoyage de la moquette, les acariens que l’on veut éradiquer, le bois qu’il faut traiter, les vêtements à protéger des mites, les végétaux du jardin ou de la maison… : autant de « bonnes raisons » d’employer un pesticide.

Et de façon paradoxale il est possible d’acheter pour l’espace familial des molécules interdites en agriculture en raison de leur toxicité pour l’homme ou l’environnement en raison des réglementa-tions différentes qui s’appliquent selon les usages.

L’usage de ceux-ci par les particuliers a été examiné dans l’étude Pesti’home,([1]) qui montre que 75 % des ménages rapportent avoir utilisé des pesticides au cours de l’année précédente, dont notamment des insecticides pyréthrinoïdes  et dans plus d’un quart des foyers au moins un produit interdit est stocké.

La lecture du document de Santé Publique France de décembre 2021([2]) Imprégnation de la population française par les pesticides organophosphorés ([3])([4])révèle que  que « différentes études réalisées en France depuis 2001 ont mis en évidence la présence de pesticides dans l’air intérieur des logements, souvent à des concentrations supérieures à celles dans l’air extérieur. »
« Les usages domestiques de pesticides concernent le plus fréquemment la lutte contre les insectes, les traitements antiparasitaires (humains pour lutter contre les poux, et vétérinaires pour lutter contre les puces et les tiques) et la protection du bois, mais aussi le traitement des végétaux intérieurs ou des espaces extérieurs (jardins, potagers, terrasses). L’utilisation domestique de certains détergents, désinfectants, désodorisants pourrait également être à l’origine d’une contamination des logements par les pesticides. »
Dans cette étude, les plus jeunes enfants ont des concentrations en métabolites ([5]) plus élevées que les enfants plus âgés.

Les diffuseurs électriques qui se branchent sur une prise de courant sont parfois efficaces, parfois moins. Tout dépend de leur composition. Acheter au hasard en magasin en se fiant aux ingrédients ne garantit pas l’efficacité. De plus, ils diffusent de l’insecticide en continu, on le respire toute la nuit.

LES INSECTICIDES PYRETHRINOÏDES ([6]) ([7])([8])
Ils dominent le marché mondial des insecticides. Prétendument plus sûrs, ils ont remplacé les organophosphorés. Mais leur action (ils tuent les insectes rapidement en agissant sur leur système nerveux) peut poser question sur leur innocuité à long terme. Bien que l’effet létal chez l’humain nécessite une dose conséquente, il est possible de suspecter l’existence d’effets neurotoxiques chroniques même à très faible dose.
Des recherches indépendantes ont suggéré que certains pyréthrinoïdes sont potentiellement neurotoxiques, cancérogènes, reprotoxiques, et capables de perturber le système endocrinien. Or, de telles conclusions ont parfois été examinées et réfutées lors de la réévaluation réglementaire des homologations par les autorités nationales ou lors d’évaluations menées par les autorités internationales à cause d’un manque de données se rapportant à la neurotoxicité chez le petit enfant.
Les réglements s’adaptent parfois lentement aux nouvelles découvertes…

L ’expertise collective de l’INSERM en juillet 2021 ([9]) montre que « les nouvelles études sur les pyréthrinoïdes mettent en évidence un lien entre l’exposition pendant la grossesse et l’augmentation des troubles du comportement de type internalisé tels que l’anxiété chez les enfants. Les données expérimentales sur des rongeurs suggèrent une hyperperméabilité de la barrière hémato-encéphalique aux pyréthrinoïdes aux stades les plus précoces du développement, confortant la plausibilité biologique de ce lien. »
Compte tenu de leur mode d’action chez les insectes, de nombreuses études se sont intéressées à l’effet de ces molécules sur l’électro-physiologie des neurones et à leurs effets sur différents canaux ioniques (canaux sodiques et canaux calciques) mais aussi une augmentation d’expression du transporteur de la dopamine.
Ces mécanismes ont été observés à de faibles doses et en lien avec un impact sur le comportement animal. Des études menées à différents stades de développement montrent que l’imprégnation cérébrale en deltaméthrine est inversement proportionnelle à l’âge, suggérant que la plus grande sensibilité aux insecticides pyréthrinoïdes chez les plus jeunes organismes pourrait être expliquée par une barrière hémato-encéphalique hyperperméable. La littérature toxicologique depuis 2013 rapporte d’autres mécanismes d’action originaux (…) modifications épigénétiques, ainsi que d’éventuels effets synergiques de pyréthrinoïdes, souvent utilisées en mélange.

La sensibilité accrue des enfants aux pesticides s’explique par une exposition plus importante que les adultes. En effet, jouant par terre et portant tout à la bouche ils sont très vulnérables aux poussières du sol qui stockent ces polluants. Jean-François Viel et Cécile Chevrier, responsables de l’étude Pelagie publiée en juin 2015([10]), se sont appuyés sur le suivi épidémiologique de 3 500 duos mère-enfant en Bretagne depuis 2002 pour étudier l’impact des polluants chimiques du quotidien sur la santé. Près de 300 mères suivies dans ce cadre pendant leur grossesse ont été sélectionnées au hasard. Elles ont participé à l’étude avec leur enfant. À 6 ans, tous les enfants ont passé des tests d’évaluation de leur compréhension verbale et de leur mémoire de travail. Les éléments familiaux pouvant jouer un rôle sur leur développement intellectuel ont été analysés. Puis les concentrations en pyréthrinoïdes des urines de la mère au cours de sa grossesse et de l’enfant à ses 6 ans ont été mises en relation avec les performances cognitives de ce dernier.

Il existe donc une relation très significative entre l’augmentation des taux de métabolites de pyréthrinoïdes dans les urines des enfants et la baisse des performances cognitives. Les enfants présentant les taux les plus élevés ont obtenu des résultats inférieurs aux tests de compréhension verbale et de mémoire de travail. Et s’ils étaient plus exposés aux pyréthrinoïdes que les enfants ayant mieux réussi les tests, il ne s’agissait pourtant que de faibles doses. Des résultats d’autant plus inquiétants que la ­quasi-totalité des logements sont contaminés par la perméthrine, une des pyréthrinoïdes les plus préoccupantes selon l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur. Comme cette substance est interdite en agriculture depuis quinze ans, on ne peut s’en prendre qu’à nos propres usages et notamment les insecticides omniprésents dans nos domiciles et réputés peu toxiques pour l’homme.
On retrouve en outre une relation statistique entre l’exposition intra-utérine au butoxyde de pipéronyle (un co-formulant ([11]) couramment employé dans les formulations de pyréthrinoïdes) et le retard du développement cognitif chez les enfants de trois ans.

Nous vous invitons à lire le travail très bien documenté et réalisé en octobre 2023 par Lola AUBERTIN étudiante en médecine à Caen exposition aux pyréthrinoïdes durant la grossesse

AUTRES INSECTICIDES ET INSECTIFUGES
Les répulsifs antimoustiques les plus efficaces sont à base de DEET à des concentrations de 25 %, 30 % voire 50 %.
 Ils sont recommandés dans toutes les zones où les moustiques risquent de transmettre la dengue, le chikungunya ou le paludisme.

Si les références de répulsifs sont nombreuses, les substances actives utilisées le sont moins. Les produits ont surtout recours au DEET (N,N-diéthyl-3-méthylbenzamide).([12]) dont le taux de concentration a comme seul impact la durée de son efficacité. Un anti-moustiques contenant 10 % de DEET aura une durée d’action de 3 heures ou moins, alors qu’un anti-moustiques à 30 % de DEET agit sur une période de 6 heures ou moins.

Pour les enfants âgés de 2 à 12 ans, il faut des anti-moustiques avec 10 % de DEET utilisés 3 fois par jour au plus. Pour les enfants de 6 mois à 2 ans, 1 fois par jour au plus.

Ce n’est pas un produit anodin : il inhibe  l’acétylcholinestérase, une enzyme clé dans l’échange d’information entre les cellules nerveuses, comme le font les insecticides organophosphorés ou carbamates en allongeant le temps de stimulation des récepteurs du système nerveux.
A  forte concentration, c’est un diluant plastique qui peut endommager les tissus synthétiques :  banquettes auto, rideaux synthétiques, montures de lunettes, bracelets de montre, etc.

L’acétamipride est un composé organochloré ([13]) de la famille des néonicotinoïdes, reconnu comme neurotoxiquepour l’homme depuis 2013 est toujours en vente sous forme d’autocollants : donc imprégnation 24/24, et souvent en pose multiple dans la maison. Ils sont définis comme des polluants organiques persistants (POPs). Ils sont lipophiles, bioaccumulables, très stables et résistants dans l’environnement

l’IR3535 (butylacétylaminopropionate d’éthyle) ce produit peut lui aussi endommager le plastique, mais ne semble, pour l’instant, pas présenter de danger à long terme.

 L’icaridine, serait pour l’instant dénué d’effets observés.

Ne pas oublier que les moustiques ont horreur du vent : un simple ventilateur oscillant permet de passer une nuit sans insecte avec la fenêtre ouverte. Et pour les petits enfants utiliser une moustiquaire …

QUELQUES  ANTIPARASITAIRES du chien et du chat

Dympilate : Anti-puces, neurotoxique :Le dimpylate est une molécule de la famille des organophosphorés (cf note 2)

Les études menées chez les animaux de laboratoire (rat, lapin) n’ont pas mis en évidence d’effet tératogène du dimpylate, mais une embryotoxicité et une maternotoxicité ont été notées. Le dimpylate ayant un passage systémique et l’exposition se prolongeant plusieurs mois, l’utilisation de cette spécialité chez la chatte en gestation ou allaitante est déconseillée, ce qui pose le problème chez l’humain.(N’oublions pas la thalidomide sans effet sur les rongeurs ([14]))

Fipronil : Anti-tiques, anti-puces et anti-gale et Anti-cafards:  (nom commercial le plus connu « frontline »)

Le fipronil est une molécule de la famille chimique des phénylpyrazoles[15]. Il a été utilisé pendant de longues années en agriculture, cet usage est aujourd’hui très limité en raison des risques de pollution et de contamination des produits alimentaires. Il est reconnu comme toxique sur tous les insectes pollinisateurs.

Néanmoins, son usage dans le domaine vétérinaire est toujours possible suite aux autorisations de mise sur le marché qui ont été délivrées pour certains médicaments contenant ce principe actif. Il reste facilement disponible en pharmacie, dans les animaleries ou en e-commerce

Son action puissante sur les insectes est « théoriquement » quasi nulle sur les vertébrés à sang chaud, c’est-à-dire sur nos animaux de compagnie et nous-mêmes ; il est très toxique chez les lapins.
Dans la notice il est conseillé de placer le produit entre les omoplates de l’animal, afin de ne pas être accessible par un chien ou un chat avec sa langue, il ne pourra donc pas avaler le produit une fois celui-ci appliqué. Mais ces produits étudiés pour diffuser sur le poil  et dans leur environnement vont y rester pendant plusieurs semaines vont rester au maximum sur la peau ce qui veut dire que se laver les mains ne suffit pas à s’en débarrasser…

Ce produit contient en outre du BHT (Butyl Hydroxy Toluène) qui en plus d’un effet synergiste possible avec le fipronil est un perturbateur endocrinien ([16])

Le fipronil peut aussi être utilisé contre les cafards et disposé en gel dans l’habitation, le risque étant de le toucher puis l’ingérer ( par exemple en suçant ses doigts pour un enfant) ou par contamination directe avec la vaisselle et encore plus les aliments  ou près des objets de toilette dans la salle de bains.

Imidaclopride : anti puces

Ce Néonicotinoïde interdit en agriculture en 2018 (effets néfastes ++ sur les pollinisateurs) avec une dérogation pour les betteraves à sucre (enrobage de semences) qui vient d’être annulée en janvier 2023, est présent en grande quantité sur certains colliers anti puces comme le SERESTO grand chien qui en contient 4,5g
Selon les usages 10 à 126g permettent de traiter un hectare ([17])([18])([19])!

EN CONCLUSION

En tant que médecins, et au vu de ces données factuelles incontestables, nous sommes profondément choqués de voir encore aujourd’hui dans les supermarchés des dizaines de produits insecticides en vente libre (tetramethrine, prallethrine, cypermethrine, transfluthrine…), sans aucune mention de ces risques connus.
Les modes de présentation sont variés (spray, diffuseurs anti moustiques ou anti-punaises de lit…) avec des pyrethrinoides quasi toujours présents dans les formulations. Le logo d’indication « nuit gravement à la santé » est présent une fois sur 2 seulement.

Les consignes de prévention concernent les animaux domestiques, rarement les surfaces en contact avec les aliments. Il est souvent précisé que le produit peut brûler les yeux, ou provoquer des sécheresses cutanées. Mais JAMAIS un avertissement en direction des femmes enceintes ou des jeunes enfants (mis à part qu’ils ne doivent pas ingérer le produit).

Pour certains, on propose même d’activer le spray pendant une dizaine de secondes en tournoyant autour de soi dans la pièce…

Ne jamais oublier que les effets délétères ne sont pas seulement observés à fortes doses, ni que le cerveau en développement est particulièrement sensible à l’exposition chroniques même de faibles doses à des agents toxiques. Les conséquences sur le développement neuropsychologique et moteur des expositions pendant la grossesse ne se limitent pas à celles visibles à la naissance mais peuvent être plus subtiles et révélées plus tardivement avec des conséquences pour la société dans son ensemble…

[1] https://www.anses.fr/fr/content/l’anses-publie-les-résultats-de-l’étude-pesti’home-sur-les-usages-des-pesticides-à-domicile

[2] https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwiCzL-bv7D9AhWrQaQEHZiND3YQFnoECCgQAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.santepubliquefrance.fr%2Fcontent%2Fdownload%2F398615%2F3297808%3Fversion%3D1&usg=AOvVaw3_uiFH1BFS4kk3zWLoBsts

[3]  Les organophosphorés et les carbamates inhibent l’activité de l’acétylcholinestérase (AChE), responsable de la dégradation de l’acétylcholine (ACh), ce qui cause l’accumulation de l’ACh au niveau synaptique, avec une hyperstimulation du système cholinergique. Comme dans la famille des carbamates, de nombreux organophosphorés sont des agents innervants, qui agissent principalement en inhibant l’acétylcholinestérase au niveau des jonctions neurales (inhibition qui devient irréversible après un temps variant selon la molécule et divers facteurs). L’acétylcholine stagne alors en excès dans les synapses, ce qui est à l’origine d’un toxidrome cholinergique impliquant le système nerveux central (SNC), la jonction neuromusculaire et le système nerveux autonome

[4] Les plus courants ont pour dénomination chimique : malathion, parathion, chlorpyrifos, dichlorvos, phosmet … et pour la famille proche des carbamates: aldicarbe, carbaryl ou propoxur… )

[5] https://alerte-medecins-pesticides.fr/ressources/dossier-metabolites/

[6] Les pyréthrinoïdes correspondent à un groupe de composés organochlorés, organofluorés ou organobromés, dont les premiers ont été tirés de la fleur du pyrèthre ou du chrysanthème, et utilisés en guise d’insecticides ou de répulsifs contre les moustiques. lls ont pour dénomination: allethrine, cyperperméthrine , perméthrine  deltaméthrine , tétraméthrine

[7]https://legacy.equiterre.org/sites/fichiers/impact_des_insecticides_pyrethrinoides_sur_la_sante_humaine_et_environnementale_resume_et_sommaire_fr.pdf

[8] https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/exposition-a-des-substances-chimiques/pesticides/documents/enquetes-etudes/impregnation-de-la-population-francaise-par-les-pyrethrinoides.-programme-national-de-biosurveillance-esteban-2014-2016

[9] https://www.inserm.fr/wp-content/uploads/2021-07/inserm-expertisecollective-pesticides2021-rapportcomplet-0.pdf  p 162 et suivantes

[10] https://presse.inserm.fr/impact-de-lexposition-environnementale-aux-insecticides-sur-le-developpement-cognitif-de-lenfant-de-6-ans/19531/

[11] https://alerte-medecins-pesticides.fr/ressources/dossier-co-formulants-et-adjuvants/

[12] https://www.lemonde.fr/planete/article/2009/08/05/le-repulsif-antimoustique-le-plus-utilise-a-des-effets-neurotoxiques-indesirables_1225967_3244.html

[13] https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/exposition-a-des-substances-chimiques/pesticides/documents/enquetes-etudes/impregnation-de-la-population-francaise-par-les-organochlores-specifiques-et-les-chlorophenols.-programme-national-de-biosurveillance-esteban-2014

[14] https://www.sciencepresse.qc.ca/blogue/2011/08/26/dessous-tragedie-thalidomide

[15] Ces insecticides ciblent la membrane interne de la mitochondrie et découplent le processus de phosphorylation oxydative https://hal.inrae.fr/tel-02824712

[16] https://www.febea.fr/fr/baseingredient/bht

[17] http://www.edppiveteau.fr/files/fiches/confidor-vert-5152f99baedce.pdf

[18] https://kisanshop.in/products/bayer-gaucho-insecticide?variant=41302560145613

[19] https://www.agrireseau.net/documents/Document_100894.pdf