LES POLLUANTS DITS ETERNELS
GÉNÉRALITÉS
On appelle ainsi surtout les substances poly et perfluoroalkylées (PFAS ([1])) qui du fait de liaisons chimiques entre carbone et fluor (liaison la plus stable de la chimie organique) se dégradent très difficilement dans l’environnement.
Largement utilisés depuis les années 1950 pour leurs propriétés antiadhésives, ils sont résistant à de fortes chaleurs et imperméables. On les retrouve dans une multitude d’objets du quotidien (les fameuses poêle Tefal, le papier cuisson, les emballages alimentaires jetables, les imperméabilisants textiles (Scotchgard, Gore-Tex), des cosmétiques (certaines crèmes solaires) ou dans des applications industrielles (mousse anti-incendie, retardateurs de flamme dans du mobilier, sur des textiles (sièges de voiture) ou associé à du matériel électronique pour éviter qu’ils prennent feu –malgré d’ailleurs des propriétés non démontrées, peintures, pesticides.
Ils agissent à des doses d’expositions infimes et présentent surtout l’inconvénient, de se dégrader très lentement -voire pas du tout. En s’accumulant dans l’environnement ils contaminent les ressources en eau et toute la chaîne alimentaire. Extrêmement utilisés, ils sont continuellement émis dans l’environnement et leur concentration s’accumule : on considère que 100 % de la population française est imprégnée par les composés perfluorés, selon une étude publiée en 2019 par Santé Publique France ([2]).
C’est une pollution invisible et pernicieuse qui affecte directement la santé des populations mais dont les effets délétères peuvent mettre plusieurs décennies à se révéler (cf infra paragraphe « conséquences »).
Le problème est signalé aux États-Unis depuis 1998. Les premières mesures prises par l’Agence de protection de l’environnement aux États-Unis datent de 2006, et préconisent une sortie progressive de quelques composés
Ce n’est que début 2023([3]), que se dessine une vraie prise de conscience en Europe avec une proposition d’interdiction par L’Agence Européenne des produits chimiques (ECHA). On ne sait hélas que trop bien pourquoi il faut attendre si longtemps : les industriels sont devenus des experts dans la fabrique du doute : amiante, chlordécone, tabac, Bisphénol A… Il faut vendre le plus longtemps possible les produits fabriqués.
LES DOSAGES ET LES « NORMES »
L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a avancé en 2020 une dose hebdomadaire tolérable (DHT) très basse, 4 ng/kg de poids corporel, par semaine ([4]), pour la somme des 4 PFAS devant faire l’objet d’une attention sanitaire particulière (PFOS, PFOA, PFNA, PFHxS). L’EFSA estime qu’une partie de la population européenne est exposée à des valeurs supérieures à cette DHT.
80 Millions des américains consomment au moins 10 ng/kg/semaine
En Europe 15 à 23 % (différence entre Sud et Nord) des adolescents ont des taux sup. à 6,9ng/l([5])([6])
Le Danemark, a adopté ses propres valeurs limites, les plus basses du continent, avec 2 ng/l pour la somme de tous les PFAS détectés dans un seul échantillon.
Selon une enquête rigoureuse : Forever Pollution Project ([7]) menée par 18 salles de rédaction européennes dont le journal « Le Monde » ([8]) plus de 17000 sites sont contaminés et dépassent 10 ng/l en Europe dont 20 installations de fabrication (cinq en France) et 2100 avec des taux records au-dessus de 100 ng/l… Et tous ces sites disséminent forcément leur pollution à distance !
Dans l’eau
Dans un rapport d’inspection du 8 juin 2017, la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) indique avoir demandé en 2015 à Arkema (à Pierre Bénite) au Sud de Lyon, de mesurer des PFAS dans les eaux, les sédiments, la faune et la flore aquatique, (la présence de perfluorés dans les poissons pêchés dans le Rhône, de 22 à 110 microgrammes par kilo les rend inconsommables.) L’industriel n’ayant pas engagé ces contrôles « au vu des coûts et de la complexité », selon la DREAL, l’Etat a repris à sa charge après des révélations journalistiques, en quelques mois, les études qu’il réclamait à l’industriel depuis des années !
Par ailleurs, des recherches de PFAS ont été menées dans près de 13 000 échantillons d’eau([9]). Selon les calculs effectués par Générations futures ([10]) (GF), au moins un PFAS (sur 18 composés différents recherchés) a été retrouvé dans 36 % des cas, soit plus d’un tiers des échantillons. Une estimation nettement supérieure aux chiffres de la seule étude de référence, réalisée en 2011 par l’Agence nationale de sécurité sanitaire, qui concluait que seuls 25 % des échantillons d’eau contenaient des PFAS.
Selon GF, ces résultats sont largement sous-estimés car ils cachent une grande hétérogénéité dans la collecte des données, les chiffres fournis sous estimant leur présence et donnant une impression faussement rassurante pour de nombreux départements !
La première disparité tient au nombre de PFAS recherchés : un seul en Guadeloupe, et jusqu’à seize dans l’Aude ou en Haute-Marne.
Disparité, aussi, dans l’effort de recherche : seulement six échantillons analysés pour les PFAS à Paris, contre 440 échantillons dans la Manche, pour une moyenne de 145 analyses de par département.
Disparité, enfin, dans les seuils de quantification retenus pour dépister les « polluants éternels » dans les eaux.
L’arrêté du 26 avril 2022 (tableau 38[11] ) prévoit le suivi de seuls 5 PFAS PFOA, PFHpA, PFHxA, PFPeA, PFBA,PFBS, mais pas le PFNA (cancérogène possible, reprotoxique probable…) dans les eaux de surface ; l’élargissement à 24 espérés ([12]) reste à l’état de projet.
La valeur sanitaire dans les eaux de surface serait de à 4.4 ng/l pour la somme des 24 PFAS identifiés…Un autre problème étant celui du dosage infinitésimal des multiples composés qui ne serait pas à la portée de toutes les agences de l’eau même si certaines l’eau savent les quantifier à des niveaux aussi bas que 0.2ng/l !
Dans les aliments
En ce qui concerne les aliments considérés comme les plus à risque ( [13] [14]), la fixation de teneurs maximales applicables à partir du 1er janvier 2023, a été publiée au Journal Officiel. Elles sont exprimées en µg/kg de poids à l’état frais : pour les œufs par exemple la dose tolérée est de1µg/kg, pour les poissons, en fonction des espèces on trouve une fourchette qui va de 2 à 35 ! et de façon surréaliste pour les abats d’animaux d’élevage la norme max est à 6 alors que pour les abats de gibier on peut monter à 50 : ce qui supposerait une imprégnation plus forte dans la « nature »!
Un lien avéré avec les pesticides
12% des substances actives des pesticides de synthèse autorisées dans l’Union européenne appartiennent à la famille des PFAS dont la présence permet de renforcer l’efficacité de la Substance Active en améliorant en particulier les propriétés hydrophobes et la rende insoluble à l’eau (de pluie par ex.).
Parmi les pesticides PFAS les plus utilisés en France, on retrouve deux herbicides : le diflufénican, considéré comme une substance persistante, bioaccumulable et toxique, et le flufénacet, dont le métabolite, l’acide trifluoroacétique (TFA), est aussi très persistant. Ces molécules ont déjà été recherchées et retrouvées dans l’eau du robinet en Allemagne.([15])
LES CONSÉQUENCES
Classés comme toxiques, bioaccumulables et persistants, ces « polluants éternels », qui se déclinent en des milliers, voire des millions de composés chimiques, ne se dégradent pas dans l’environnement et constituent l’une des plus graves contaminations auxquelles le monde est aujourd’hui confronté.
En France, des PFAS (en particulier le PFOS et PFOA, des PFAS « historiques », interdits depuis 2009 et 2019) sont présentes dans le sang de la totalité de la population, adultes et enfants, comme l’a montré le programme de surveillance en 2020([16]).
Des travaux scientifiques conduits sur la population des Etats-Unis parviennent au même constat, ou presque : les PFAS sont en effet retrouvées dans 97 % à 100 % des échantillons testés ([17]).
Conséquences sur la santé
Ils sont incriminés dans des pathologies aussi variées que : la diminution du poids des bébés à la naissance, des cancers du sein, du rein, de la prostate ou des testicules ; des problèmes de fertilité féminine ([18]) et qualité du sperme ; baisse de la réponse immunitaire aux vaccins chez les enfants ([19]) ; des perturbations du système endocrinien (thyroïde)([20] [21]); une hausse du taux de cholestérol et de la tension artérielle, et prééclampsie (hypertension due à la grossesse avec un risque fœto-maternel) ; des risques cardio-vasculaires ; des trouble du développement cérébral chez l’enfant ([22])
Récemment (avril 2023) une étude danoise ([23]) a montré un lien entre l’exposition aux PFAS et l’explosion du nombre de cas d’obésité.
Conséquences sur l’environnement
Bien que les chercheurs soient parvenus à identifier une faiblesse chez certains types de PFAS : à l’une des extrémités de leur molécule, un groupe d’atomes d’oxygène peut être ciblé par un solvant et un réactif courant à des températures moyennes de 80 à 120 degrés Celsius ([24]).
Le coût de l’assainissement serait de l’ordre de dizaines de milliards d’euros. À plusieurs endroits, les autorités ont déjà renoncé et décidé de garder les produits chimiques toxiques dans le sol, car il n’est pas possible de les nettoyer.
Il semble donc impossible de traiter cette contamination planétaire et l’axe le plus ambitieux du plan ([25]) vise à « réduire les émissions des industriels émetteurs de façon significative » en identifiant les plus gros pollueurs.
Plus de cent organisations ont demandé à la commission européenne de bannir les PFAS d’ici 2030 ([26]) et pointent les faiblesses de la législation REACH (Registration Evaluation Autorisation and restriction of Chemicals entré en vigueur en 2007 pour sécuriser la fabrication et l’utilisation des substances chimiques dans l’industrie européenne).
Cinq pays : Danemark, Allemagne, Norvège, Suède et Pays Bas appelle l’Europe à bannir cette pollution et s’assurer que les pollueurs seront aussi les payeurs.
[1] https://echa.europa.eu/fr/hot-topics/perfluoroalkyl-chemicals-pfas
[2] https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/exposition-a-des-substances-chimiques/perturbateurs-endocriniens/documents/rapport-synthese/impregnation-de-la-population-francaise-par-les-composes-perfluores-programme-national-de-biosurveillance-esteban-2014-2016
[3] https://echa.europa.eu/fr/-/echa-publishes-pfas-restriction-proposal
[4] https://www.efsa.europa.eu/en/efsajournal/pub/6223
[5] https://www.hbm4eu.eu/wp-content/uploads/2022/07/PFAS_Substance-report.pdf
[6] https://www.hbm4eu.eu/wp-content/uploads/2022/06/HBM4EU_Policy-Brief-PFAS.pdf
[7] https://foreverpollution-eu.translate.goog/?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc
[8] https://www-lemonde-fr.translate.goog/en/les-decodeurs/article/2023/02/23/forever-pollution-explore-the-map-of-europe-s-pfas-contamination_6016905_8.html?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc
[9] https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/01/12/en-france-la-contamination-des-eaux-de-surface-par-les-pfas-polluants-eternels-est-largement-sous-estimee-selon-une-association_6157513_3244.html
[10] https://www.generations-futures.fr/actualites/pfas-eaux-surface/
[11] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045780020
[12] https://www.senat.fr/questions/base/2023/qSEQ230205015.html
[13] https://www.eurofins.fr/agroalimentaire/actualités/actualités/pfas-règlementation-européenne-applicable-dès-le-1er-janvier-2023/
[14] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32022H1431&qid=1661518707943
[15] https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/11/09/certains-pesticides-sont-aussi-des-polluants-eternels-revelent-deux-ong_6199102_3244.html
[16] https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/exposition-a-des-substances-chimiques/perturbateurs-endocriniens/documents/rapport-synthese/impregnation-de-la-population-francaise-par-les-composes-perfluores-programme-national-de-biosurveillance-esteban-2014-2016
[17] https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/02/23/polluants-eternels-quels-sont-les-effets-des-pfas-sur-la-sante_6162939_4355770.html
[18] https://academic.oup.com/humupd/article/26/5/724/5848465?login=false
[19] https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/1104903
[20] https://www.mdpi.com/1660-4601/12/6/6098
[21] https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32311629/
[22] https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35480070/
[23] https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/04/19/pfas-l-exposition-aux-polluants-eternels-contribue-aussi-a-la-pandemie-d-obesite_6170115_3244.html
[24]https://www.science.org/doi/10.1126/science.abm8868?utm_campaign=SciMag&utm_source=Social&utm_medium=Twitter
[25] https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/22261_Plan-PFAS.pdf
[26] https://www.env-health.org/over-100-organisations-call-on-the-european-commission-to-fully-ban-pfas-by-2030/
LES POLLUANTS DITS ETERNELS
GÉNÉRALITÉS
On appelle ainsi surtout les substances poly et perfluoroalkylées (PFAS ([1])) qui du fait de liaisons chimiques entre carbone et fluor (liaison la plus stable de la chimie organique) se dégradent très difficilement dans l’environnement.
Largement utilisés depuis les années 1950 pour leurs propriétés antiadhésives, ils sont résistant à de fortes chaleurs et imperméables. On les retrouve dans une multitude d’objets du quotidien (les fameuses poêle Tefal, le papier cuisson, les emballages alimentaires jetables, les imperméabilisants textiles (Scotchgard, Gore-Tex), des cosmétiques (certaines crèmes solaires) ou dans des applications industrielles (mousse anti-incendie, retardateurs de flamme dans du mobilier, sur des textiles (sièges de voiture) ou associé à du matériel électronique pour éviter qu’ils prennent feu –malgré d’ailleurs des propriétés non démontrées, peintures, pesticides.
Ils agissent à des doses d’expositions infimes et présentent surtout l’inconvénient, de se dégrader très lentement -voire pas du tout. En s’accumulant dans l’environnement ils contaminent les ressources en eau et toute la chaîne alimentaire. Extrêmement utilisés, ils sont continuellement émis dans l’environnement et leur concentration s’accumule : on considère que 100 % de la population française est imprégnée par les composés perfluorés, selon une étude publiée en 2019 par Santé Publique France ([2]).
C’est une pollution invisible et pernicieuse qui affecte directement la santé des populations mais dont les effets délétères peuvent mettre plusieurs décennies à se révéler (cf infra paragraphe « conséquences »).
Le problème est signalé aux États-Unis depuis 1998. Les premières mesures prises par l’Agence de protection de l’environnement aux États-Unis datent de 2006, et préconisent une sortie progressive de quelques composés
Ce n’est que début 2023([3]), que se dessine une vraie prise de conscience en Europe avec une proposition d’interdiction par L’Agence Européenne des produits chimiques (ECHA). On ne sait hélas que trop bien pourquoi il faut attendre si longtemps : les industriels sont devenus des experts dans la fabrique du doute : amiante, chlordécone, tabac, Bisphénol A… Il faut vendre le plus longtemps possible les produits fabriqués.
LES DOSAGES ET LES « NORMES »
L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a avancé en 2020 une dose hebdomadaire tolérable (DHT) très basse, 4 ng/kg de poids corporel, par semaine ([4]), pour la somme des 4 PFAS devant faire l’objet d’une attention sanitaire particulière (PFOS, PFOA, PFNA, PFHxS). L’EFSA estime qu’une partie de la population européenne est exposée à des valeurs supérieures à cette DHT.
80 Millions des américains consomment au moins 10 ng/kg/semaine
En Europe 15 à 23 % (différence entre Sud et Nord) des adolescents ont des taux sup. à 6,9ng/l([5])([6])
Le Danemark, a adopté ses propres valeurs limites, les plus basses du continent, avec 2 ng/l pour la somme de tous les PFAS détectés dans un seul échantillon.
Selon une enquête rigoureuse : Forever Pollution Project ([7]) menée par 18 salles de rédaction européennes dont le journal « Le Monde » ([8]) plus de 17000 sites sont contaminés et dépassent 10 ng/l en Europe dont 20 installations de fabrication (cinq en France) et 2100 avec des taux records au-dessus de 100 ng/l… Et tous ces sites disséminent forcément leur pollution à distance !
Dans l’eau
Dans un rapport d’inspection du 8 juin 2017, la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) indique avoir demandé en 2015 à Arkema (à Pierre Bénite) au Sud de Lyon, de mesurer des PFAS dans les eaux, les sédiments, la faune et la flore aquatique, (la présence de perfluorés dans les poissons pêchés dans le Rhône, de 22 à 110 microgrammes par kilo les rend inconsommables.) L’industriel n’ayant pas engagé ces contrôles « au vu des coûts et de la complexité », selon la DREAL, l’Etat a repris à sa charge après des révélations journalistiques, en quelques mois, les études qu’il réclamait à l’industriel depuis des années !
Par ailleurs, des recherches de PFAS ont été menées dans près de 13 000 échantillons d’eau([9]). Selon les calculs effectués par Générations futures ([10]) (GF), au moins un PFAS (sur 18 composés différents recherchés) a été retrouvé dans 36 % des cas, soit plus d’un tiers des échantillons. Une estimation nettement supérieure aux chiffres de la seule étude de référence, réalisée en 2011 par l’Agence nationale de sécurité sanitaire, qui concluait que seuls 25 % des échantillons d’eau contenaient des PFAS.
Selon GF, ces résultats sont largement sous-estimés car ils cachent une grande hétérogénéité dans la collecte des données, les chiffres fournis sous estimant leur présence et donnant une impression faussement rassurante pour de nombreux départements !
La première disparité tient au nombre de PFAS recherchés : un seul en Guadeloupe, et jusqu’à seize dans l’Aude ou en Haute-Marne.
Disparité, aussi, dans l’effort de recherche : seulement six échantillons analysés pour les PFAS à Paris, contre 440 échantillons dans la Manche, pour une moyenne de 145 analyses de par département.
Disparité, enfin, dans les seuils de quantification retenus pour dépister les « polluants éternels » dans les eaux.
L’arrêté du 26 avril 2022 (tableau 38[11] ) prévoit le suivi de seuls 5 PFAS PFOA, PFHpA, PFHxA, PFPeA, PFBA,PFBS, mais pas le PFNA (cancérogène possible, reprotoxique probable…) dans les eaux de surface ; l’élargissement à 24 espérés ([12]) reste à l’état de projet.
La valeur sanitaire dans les eaux de surface serait de à 4.4 ng/l pour la somme des 24 PFAS identifiés…Un autre problème étant celui du dosage infinitésimal des multiples composés qui ne serait pas à la portée de toutes les agences de l’eau même si certaines l’eau savent les quantifier à des niveaux aussi bas que 0.2ng/l !
Dans les aliments
En ce qui concerne les aliments considérés comme les plus à risque ( [13] [14]), la fixation de teneurs maximales applicables à partir du 1er janvier 2023, a été publiée au Journal Officiel. Elles sont exprimées en µg/kg de poids à l’état frais : pour les œufs par exemple la dose tolérée est de1µg/kg, pour les poissons, en fonction des espèces on trouve une fourchette qui va de 2 à 35 ! et de façon surréaliste pour les abats d’animaux d’élevage la norme max est à 6 alors que pour les abats de gibier on peut monter à 50 : ce qui supposerait une imprégnation plus forte dans la « nature »!
Un lien avéré avec les pesticides
12% des substances actives des pesticides de synthèse autorisées dans l’Union européenne appartiennent à la famille des PFAS dont la présence permet de renforcer l’efficacité de la Substance Active en améliorant en particulier les propriétés hydrophobes et la rende insoluble à l’eau (de pluie par ex.).
Parmi les pesticides PFAS les plus utilisés en France, on retrouve deux herbicides : le diflufénican, considéré comme une substance persistante, bioaccumulable et toxique, et le flufénacet, dont le métabolite, l’acide trifluoroacétique (TFA), est aussi très persistant. Ces molécules ont déjà été recherchées et retrouvées dans l’eau du robinet en Allemagne.([15])
LES CONSÉQUENCES
Classés comme toxiques, bioaccumulables et persistants, ces « polluants éternels », qui se déclinent en des milliers, voire des millions de composés chimiques, ne se dégradent pas dans l’environnement et constituent l’une des plus graves contaminations auxquelles le monde est aujourd’hui confronté.
En France, des PFAS (en particulier le PFOS et PFOA, des PFAS « historiques », interdits depuis 2009 et 2019) sont présentes dans le sang de la totalité de la population, adultes et enfants, comme l’a montré le programme de surveillance en 2020([16]).
Des travaux scientifiques conduits sur la population des Etats-Unis parviennent au même constat, ou presque : les PFAS sont en effet retrouvées dans 97 % à 100 % des échantillons testés ([17]).
Conséquences sur la santé
Ils sont incriminés dans des pathologies aussi variées que : la diminution du poids des bébés à la naissance, des cancers du sein, du rein, de la prostate ou des testicules ; des problèmes de fertilité féminine ([18]) et qualité du sperme ; baisse de la réponse immunitaire aux vaccins chez les enfants ([19]) ; des perturbations du système endocrinien (thyroïde)([20] [21]); une hausse du taux de cholestérol et de la tension artérielle, et prééclampsie (hypertension due à la grossesse avec un risque fœto-maternel) ; des risques cardio-vasculaires ; des trouble du développement cérébral chez l’enfant ([22])
Récemment (avril 2023) une étude danoise ([23]) a montré un lien entre l’exposition aux PFAS et l’explosion du nombre de cas d’obésité.
Conséquences sur l’environnement
Bien que les chercheurs soient parvenus à identifier une faiblesse chez certains types de PFAS : à l’une des extrémités de leur molécule, un groupe d’atomes d’oxygène peut être ciblé par un solvant et un réactif courant à des températures moyennes de 80 à 120 degrés Celsius ([24]).
Le coût de l’assainissement serait de l’ordre de dizaines de milliards d’euros. À plusieurs endroits, les autorités ont déjà renoncé et décidé de garder les produits chimiques toxiques dans le sol, car il n’est pas possible de les nettoyer.
Il semble donc impossible de traiter cette contamination planétaire et l’axe le plus ambitieux du plan ([25]) vise à « réduire les émissions des industriels émetteurs de façon significative » en identifiant les plus gros pollueurs.
Plus de cent organisations ont demandé à la commission européenne de bannir les PFAS d’ici 2030 ([26]) et pointent les faiblesses de la législation REACH (Registration Evaluation Autorisation and restriction of Chemicals entré en vigueur en 2007 pour sécuriser la fabrication et l’utilisation des substances chimiques dans l’industrie européenne).
Cinq pays : Danemark, Allemagne, Norvège, Suède et Pays Bas appelle l’Europe à bannir cette pollution et s’assurer que les pollueurs seront aussi les payeurs.
[1] https://echa.europa.eu/fr/hot-topics/perfluoroalkyl-chemicals-pfas
[2] https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/exposition-a-des-substances-chimiques/perturbateurs-endocriniens/documents/rapport-synthese/impregnation-de-la-population-francaise-par-les-composes-perfluores-programme-national-de-biosurveillance-esteban-2014-2016
[3] https://echa.europa.eu/fr/-/echa-publishes-pfas-restriction-proposal
[4] https://www.efsa.europa.eu/en/efsajournal/pub/6223
[5] https://www.hbm4eu.eu/wp-content/uploads/2022/07/PFAS_Substance-report.pdf
[6] https://www.hbm4eu.eu/wp-content/uploads/2022/06/HBM4EU_Policy-Brief-PFAS.pdf
[7] https://foreverpollution-eu.translate.goog/?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc
[8] https://www-lemonde-fr.translate.goog/en/les-decodeurs/article/2023/02/23/forever-pollution-explore-the-map-of-europe-s-pfas-contamination_6016905_8.html?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc
[9] https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/01/12/en-france-la-contamination-des-eaux-de-surface-par-les-pfas-polluants-eternels-est-largement-sous-estimee-selon-une-association_6157513_3244.html
[10] https://www.generations-futures.fr/actualites/pfas-eaux-surface/
[11] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045780020
[12] https://www.senat.fr/questions/base/2023/qSEQ230205015.html
[13] https://www.eurofins.fr/agroalimentaire/actualités/actualités/pfas-règlementation-européenne-applicable-dès-le-1er-janvier-2023/
[14] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32022H1431&qid=1661518707943
[15] https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/11/09/certains-pesticides-sont-aussi-des-polluants-eternels-revelent-deux-ong_6199102_3244.html
[16] https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/exposition-a-des-substances-chimiques/perturbateurs-endocriniens/documents/rapport-synthese/impregnation-de-la-population-francaise-par-les-composes-perfluores-programme-national-de-biosurveillance-esteban-2014-2016
[17] https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/02/23/polluants-eternels-quels-sont-les-effets-des-pfas-sur-la-sante_6162939_4355770.html
[18] https://academic.oup.com/humupd/article/26/5/724/5848465?login=false
[19] https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/1104903
[20] https://www.mdpi.com/1660-4601/12/6/6098
[21] https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32311629/
[22] https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35480070/
[23] https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/04/19/pfas-l-exposition-aux-polluants-eternels-contribue-aussi-a-la-pandemie-d-obesite_6170115_3244.html
[24]https://www.science.org/doi/10.1126/science.abm8868?utm_campaign=SciMag&utm_source=Social&utm_medium=Twitter
[25] https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/22261_Plan-PFAS.pdf
[26] https://www.env-health.org/over-100-organisations-call-on-the-european-commission-to-fully-ban-pfas-by-2030/